Quand je suis tombée enceinte, j’étais heureuse en couple avec le père de l’enfant et nous avions tous les deux ce projet de fonder une famille.
C’est en tous cas ce que je croyais.
A l’annonce de ma grossesse David a eu l’air sincèrement heureux. Nous étions ensemble depuis un peu plus de deux ans, avions une situation stable et vivions dans une maison en banlieue de Lyon.
Je n’ai pas remarqué de changement particulier dans son attitude durant le premier trimestre. Ou alors, trop centrée sur ma grossesse et épuisée par les nausées je n’y ai peut-être pas fait assez attention.

Au cours du troisième mois, il m’a annoncé qu’il n’était plus sûr de vouloir cet enfant, qu’il n’en n’avait pas envie maintenant.

Je lui ai dit que c’était trop tard, il m’a dit que je pouvais encore avorter, que le délai légal était toujours valable.Cette phrase a été un véritable coup de poignard pour moi. Je désirais cet enfant et je savais que je ne voulais pas avorter. Et en refusant je m’opposais à ses désirs et ses projets et je savais que notre vie de couple ne le supporterai pas.

J’ai refusé d’avorter et il a pris ses distances. Nous avons d’abord décidé de nous laisser un peu de temps et il est parti vivre chez un ami.
Malgré mes messages, il n’est pas venu avec moi à l’échographie morphologique. J’ai pleuré toute l’après-midi qui a suivi.

Au cours du second trimestre il a été clair qu’il ne voulait pas s’impliquer dans la grossesse et qu’il n’avait pas changé d’avis.
J’ai appris par des connaissances communes qu’il sortait beaucoup et rencontrait d’autres filles…bref, apparement il n’avait plus du tout le projet de fonder une famille avec moi et d’assumer cet enfant qu’il avait pourtant désiré.

Je lui ai clairement demandé s’il voulait le reconnaître à sa naissance et il m’a dit qu’il ne pensait pas, qu’il ne se voyait pas jouer un rôle dans sa vie, ni maintenant ni plus tard.
Epuisée physiquement et moralement je n’ai pas voulu me battre. J’ai décidé de le rayer de ma vie et d’avoir cet enfant seule.

Le plus dur dans cette grossesse seule a probablement été d’aller seule à tous les rendez-vous, notamment les échographies, et de m’entendre demander à chaque fois si le papa comptait venir. Souvent j’ai eu honte et j’ai préféré prétexter qu’il n’était pas disponible plutôt que d’expliquer la situation.

Je me suis sentie terriblement seule.

Bien que ma mère et ma soeur ne vivent pas très loin de chez moi (une heure de route environ), au quotidien je n’avais personne avec qui partager cette grossesse et ses moments forts : j’étais seule quand j’ai senti mon bébé bouger pour la première fois, il n’y avait personne à qui proposer de poser sa main sur mon ventre pour sentir ses petits coups.
J’étais seule aussi durant les nuits d’insomnie et sans personne à mes côtés avec qui partager mes angoisses.
Si physiquement je tenais le coup, même si je n’aurais pas dit non à un massage le soir après une longue journée au bureau ou une présence rassurante lorsque je ressentais des douleurs inhabituelles, c’est moralement que l’absence du père s’est faite le plus sentir.

Le jour de l’accouchement j’ai perdu les eaux alors que j’étais seule chez moi. C’était deux semaines avant le terme, je m’y attendais donc plus ou moins et j’ai immédiatement prévenu ma mère pour qu’elle me rejoigne et m’accompagne ensuite à la maternité.
Je ne voulais pas accoucher seule, j’avais peur.
Elle a pris la route immédiatement mais durant une heure je suis resté seule à essayer de gérer des contractions de plus en plus forte. 


J’ai commencé à perdre pied et pleurer, je n’étais même plus sûre de vouloir élever cet enfant en mère célibataire, je ne m’en sentais plus capable.

 


Finalement, une fois à la maternité avec ma mère à mes côtés et la péridurale posée j’ai commencé à me relaxer.
J’étais entourée d’une équipe très compétente et bienveillante que j’ai mis au courant de la situation et qui ont été d’un soutien formidable.

L’accouchement a été un peu long mais s’est bien déroulé dans l’ensemble, et quand j’ai entendu le premier cri de Rose, ma fille, et qu’on me l’a posé dans les bras, j’ai immédiatement fondu en larmes de bonheur et de soulagement.
Elle était là et c’est tout ce qui comptait pour moi.
Nous étions là l’une pour l’autre.


Elle s’est blottie contre moi, a pris sa première tétée et j’ai compris que même si ce n’était pas ce qui était prévu, même si ce n’était pas idéal, j’y arriverais.

Aujourd’hui elle 8 mois et tout va bien. Nous sommes entourées par ma famille, mes amis, et même si son père biologique n’a jamais demandé à la voir ni de ses nouvelles malgré que nous soyons en contact pour la vente de notre maison et d’autres formalités pour notre séparation, elle est loin de grandir seule, au contraire.

Élisa. B

Propos recueillis et retranscrits par Tousparents